Amicalement surnommé l’hôtel « rose » par les francophones à cause de sa douce couleur pastel qui n’est plus qu’un souvenir, l’Hollywood Beach Resort sera bientôt centenaire et les pages de son histoire n’en finissent plus de s’accumuler. Le chapitre actuel pourrait s’intituler : rénover ou reconstruire, car s’il était jadis chic et haut de gamme, tous se posent la question : quelle allure aura cet icône pour son 100e anniversaire l’an prochain ?
Inauguration 1925
La propriété géante, qui s’étend le long de l’Ocean Drive à Hollywood, a été construite en 1925 à la demande de Joseph Wesley Young, fondateur de la ville. Ses 500 chambres et son solarium, le plus grand du monde à l’époque, lui donnaient à juste titre le nom « The Grand Lady ». Selon Clive Taylor, président de la Hollywood Historical Society, « l’hôtel était autrefois considéré comme le plus grand moteur économique du comté de Broward ».
Il a joué un rôle central dans la Seconde Guerre mondiale en servant à l’école d’endoctrinement et de formation navale américaine (United States Naval Indoctrination and Training School). Après la guerre, l’hôtel a été rénové et a rouvert sous une nouvelle direction.
Situé directement face au pont-levis du boulevard Hollywood, le bâtiment charmeur était alors convoité pour recevoir les grandes réunions, des mariages et des fêtes importantes. Surtout, il accueillait les résidents juifs du Sud de la Floride à une époque où de nombreuses cartes postales d’hôtels indiquaient ouvertement « clientèle restreinte ».
Nouvelle vocation
Rapidement, le modèle commercial a fait du Hollywood Beach Resort, le centre des congrès du comté. Au fil des ans, The Grand Lady adaptait sa vocation selon la situation économique. L’hôtel est passé de siège du Florida Bible College, au site d’une salle de cinéma, à un centre commercial, pour finalement être transformé en condos exploités sous forme de multipropriété/timeshare. Ceci représente des milliers de propriétaires durant cinq décennies qui ne s’accordaient pas souvent sur les rénovations à effectuer.
Tentative de résolution
Mal entretenu durant trop longtemps, une cloche a sonné à la suite de l’effondrement des Champlain Towers à Surfside en 2021. Les très nombreux propriétaires de condos, fervents réfractaires aux améliorations, se sont rendu compte qu’il était peut-être temps de vendre parce que l’évaluation des coûts d’inspections et des rénovations de la copropriété dépassait largement la valeur de leur condo. Selon la ville d’Hollywood, il ne reste aujourd’hui que deux intérêts fonciers individuels; le stationnement et le bâtiment sont détenus par deux entités distinctes, The Chetrit Group et Equishares Inc. Il est estimé que la propriété deviendra probablement plus facile à développer, sauf que l’affaire reste compliquée.
Selon un procès intenté le 30 novembre 2022, la société de développement immobilier et d’investissement Equishares Inc., basée en Floride, a poursuivi la société immobilière de New York, The Chetrit Group, alléguant que Chetrit avait tenté d’exclure Equishares d’un accord visant à développer l’hôtel. Le procès affirme qu’Equishares a identifié la propriété comme site potentiel de développement dès 2018 et a fait participer le groupe Chetrit à l’accord en 2019.
Alors que les négociations se terminaient pour racheter les propriétés, le procès allègue que le groupe Chetrit a commencé à acheter les multipropriétés et unités de copropriété à l’intérieur de l’hôtel dans le but de conserver une participation majoritaire dans l’association des propriétaires et éventuellement de la dissoudre sans en informer Equishares.
En attendant, c’est le délabre et rien ne bouge. Le premier étage de la propriété, où prospérait autrefois le centre commercial Ocean Walk, est entouré de rubans jaunes et clôtures signalant une zone interdite.
Les tentatives visant à polir la relique n’ont rien donné et les deux propriétaires actuels doivent comparaître devant un tribunal.
Hollywood Beach Resort célébrera possiblement ses 100 ans sous silence.
