
Les informations suivantes ont été recueillies à partir du dossier Point de vue économique, publié par Florence Jean-Jacobs, économiste principale au Mouvement Desjardins, en date du 17 janvier 2025.
Ces extraits nous éclairent sur l’incidence potentielle d’éventuels tarifs sur les différents secteurs de l’économie canadienne.
Extraits :
« Donald Trump en a surpris plusieurs le 25 novembre dernier en déclarant vouloir imposer des tarifs universels de 25 % visant les importations provenant du Canada et du Mexique. Ses annonces précédentes laissaient entendre que des tarifs de 10 % feraient partie de ses premières actions une fois en poste.
Alors que son mandat débute officiellement le 20 janvier 2025, les entreprises canadiennes sont, à raison, hautement préoccupées. Certaines devraient l’être plus que d’autres.
[…] Nous jugeons probable que les secteurs de l’énergie et de la fabrication automobile bénéficient d’exemptions de tarifs, bien qu’un haut niveau d’incertitude demeure. Mais cela risque de ne pas tenir la route pour d’autres secteurs où les Américains ont accès à des solutions de rechange (intérieures et extérieures) pour s’approvisionner. […]
Les secteurs de l’extraction pétrolière et de la fabrication d’automobiles et de pièces sont les plus dépendants des exportations vers notre voisin du Sud. Or, nous estimons qu’ils ne sont pas les plus à risque sous l’administration Trump. Dans le cas du pétrole brut, la production américaine est insuffisante pour répondre aux besoins nationaux, et avec des importations en provenance du Canada représentant 58 % des importations américaines de pétrole, les tarifs risquent de faire augmenter son prix de façon importante, ce qui irait à l’encontre des promesses de Trump de réduire les prix de l’énergie.
Dans le cas de la fabrication automobile, […] l’industrie américaine dépend fortement du Canada et du Mexique. L’industrie automobile nord‑américaine est particulièrement intégrée au nord et au sud de la frontière américaine, avec plus de 50 % du commerce impliquant des compagnies liées, le tiers de l’offre américaine dépendant directement d’importations, et une production intérieure dont plus de 20 % dépendent d’intrants intermédiaires importés. […]
Notre dépendance aux États‑Unis est particulièrement élevée dans les industries de fabrication et de matières premières.
Environ la moitié de la valeur de la production intérieure canadienne de l’industrie de l’extraction minière, de pétrole et de gaz est exportée aux États‑Unis. Dans le secteur de la fabrication dans son ensemble, c’est environ le tiers, mais c’est plus de 50 % pour le secteur automobile et plus de 40 % en aéronautique.
Le secteur agroalimentaire est également fort exposé (pêche, agriculture, transformation), de même que celui du bois et du papier, de la transformation de métaux et des produits chimiques. Et tout choc à ces industries se répercute sur celles qui en dépendent : transport et entreposage, commerce de gros, services professionnels. On estime qu’environ 10 % à 15 % de la valeur de la production intérieure de ces industries sont exportés aux États‑Unis.
La menace de tarifs est‑elle crédible pour toutes les industries ?
[…] Du point de vue des multinationales américaines établies en sol canadien, des tarifs à l’importation signifieraient des coûts non négligeables. Surtout que plus de la moitié de la valeur totale des exportations du Canada vers les États‑Unis implique des entreprises liées, c’est‑à‑dire que l’exportateur et l’importateur ont un propriétaire en commun. Par exemple, la moitié des camionnettes vendues par General Motors aux États‑Unis sont en fait importées de ses usines du Canada ou du Mexique.
Une autre avenue pour les fabricants et autres multinationales – toutefois moins facilement mise en œuvre à court terme – serait de rapatrier la production aux États‑Unis ou du moins minimiser les investissements dans les filiales canadiennes. Cela aurait une incidence fort dommageable sur l’investissement au Canada.
L’autre option serait de maintenir les chaînes d’approvisionnement telles quelles, et d’encaisser la hausse de coûts : soit en retranchant les profits ou en tentant de transmettre la hausse de coûts aux utilisateurs finaux, qui paieraient des prix plus élevés. […]
Quels seraient les effets directs et indirects au Canada et au Québec ?
[…]. L’imposition de tarifs est plus probable dans des secteurs où les États‑Unis ont accès à des substituts pour combler leurs besoins. C’est le cas notamment dans plusieurs sous‑secteurs de la fabrication et de l’extraction minière, de même que pour l’élevage et la pêche.
Parmi ceux‑ci, la baisse des revenus serait plus prononcée dans les industries dont un fort pourcentage de la production est destiné aux États‑Unis. Ainsi, les secteurs qui risquent de subir les contrecoups les plus importants d’éventuels tarifs seraient les métaux primaires (y compris l’aluminium), la fabrication d’aliments et de boissons, les produits chimiques, la machinerie, et l’aéronautique.
Quant à elles, les industries du bois, des pâtes et papiers, des métaux non ferreux et des plastiques sont à surveiller.
C’est également le cas des secteurs du transport et du commerce de gros, qui subiraient d’importants effets indirects d’éventuels tarifs.
L’agriculture, la pêche et l’élevage ne seraient pas épargnés non plus des effets indirects d’une baisse de demande pour l’exportation de produits alimentaires transformés.
Les industries moins exposées au commerce extérieur s’en sortiraient mieux, comme c’est le cas de plusieurs secteurs des services. Elles pourraient tout de même subir des effets induits en cas de ralentissement économique généralisé occasionné par les tarifs. […]
Conclusion
Alors que les exportations canadiennes semblent avoir terminé l’année 2024 à un bon rythme (la perspective de barrières tarifaires incitant les entreprises américaines à bâtir des stocks), cette tendance pourrait se renverser au courant de 2025, avec l’entrée en poste de Donald Trump […].
Nous concluons que les secteurs qui risquent de subir les contrecoups les plus importants d’éventuels tarifs seraient les métaux primaires (y compris l’aluminium), la fabrication d’aliments et de boissons, les produits chimiques, la machinerie et l’aéronautique (voir les industries en rouge dans le tableau sommaire). Quant à elles, les industries du bois, des pâtes et papiers, des métaux non ferreux et des plastiques sont à surveiller (voir les industries en jaune dans le tableau sommaire). Les secteurs du transport et du commerce de gros subiraient aussi d’importants effets indirects d’éventuels tarifs, tout comme l’agriculture, la pêche et la foresterie.
Les industries moins exposées au commerce extérieur s’en sortiraient mieux, comme c’est le cas de plusieurs secteurs des services. Elles pourraient tout de même subir des effets induits en cas de ralentissement économique généralisé occasionné par les tarifs. »
